En salle

Claire BAGLIN

Les Éditions de Minuit

  • Conseillé par
    2 février 2023

    Tout cela est très bien vu : le père, figure importante, qui ne se sent nulle part à sa place sauf dans sa maison dans une famille à l'ancienne : le canapé, la télé et le travail harassant pour lui et les tâches ménagères pour elle, et dans son travail, vingt ans dans la même boîte et une médaille méritée. Le premier fastfood est pour lui une découverte, une aventure : il ne sait où aller, quoi commander, il ralentit le rythme, se fait houspiller, s'énerve. Claire Baglin raconte la vie d'une famille modeste et la découverte par la jeune fille, la narratrice lorsqu'elle entre au lycée, d'un autre monde plus aisé, socialement plus enviable et sa difficulté à y entrer et à cacher le sien non pas par honte mais parce qu'elle craint d'être jugée. Et si mes années lycée sont très loin, cela résonne en moi encore aujourd'hui et éveille quelques souvenirs pas très heureux, enfant de la cité -pas la même ambiance qu'aujourd'hui, mais quand même la cité-, un peu renfermé qui découvre un autre monde et ne s'y sent ni bien ni accueilli -mais sans doute n'a-t-il pas permis un autre accueil.

    L'autre partie du livre s'intéresse aux travailleurs de fastfoods : l'obéissance absolue, le dos rond devant les remarques des manageurs et des clients-rois pas toujours aimables et parfois même méprisants. La répétition des gestes, l'angoisse de trouver une tâche lorsqu'on est de service de salle et que celle-ci s'est vidée, car l'antienne de ces restaurants combat le désœuvrement. Les coups durs aux heures des repas surtout lorsqu'il manque du personnel, les heures supplémentaires, les sonneries à tout-va pour la friteuse, pour la pointeuse... Le bruit incessant. L'aliénation au travail : surtout ne plus penser, travailler, répéter les gestes mécaniquement.

    Claire Baglin écrit un texte fort dans ses deux thématiques, sans effets, sans artifices. Le style est direct, descriptif, c'est entre les lignes qu'on lit les sentiments, les émotions de la narratrice. Les amateurs de fastfood, après cette lecture, ne devraient plus regarder les employés de la même manière.


  • Conseillé par (Libraire)
    7 novembre 2022

    Lancinant

    Deux récits qui s'affrontent, à deux époques distinctes. L'enfance de la narratrice, dans laquelle elle raconte la vie de famille. Un père ouvrier qui travaille dur, avec dignité et abnégation, dans le respect de sa hiérarchie, une mère dévouée à ses enfants. Et bien des années plus tard, le récit factuel de sa première expérience professionnelle, employée dans un fast-food. Elle nous raconte par le menu son quotidien réglé comme du papier à musique, ses gestes mécaniques, la précarité de ce travail et l'absence totale de fierté à exercer une telle tâche. Ainsi fait, la narratrice sera de celle qui dit non, et refuse l'humiliation pour elle, pour son père et pour tous ceux qui ont vécu le mépris de leur condition.
    Un roman sans pathos, franc et fort bien maîtrisé.


  • Conseillé par
    1 novembre 2022

    vie moderne

    J’ai découvert cette branche de la restauration du côté des cuisines où tout n’est pas nickel (personne ne semble se soucier d’une fuite d’eau), où les équipiers s’ennuient parfois, où les chefs ont leur caractère.

    J’ai eu plus de mal avec le père de la narratrice, homme taciturne qui s’exprime peu, puis de moins en moins au fur et à mesure des années.

    J’ai trouvé dommage que la narratrice fasse intervenir parfois son frère Nico sans en dire plus.

    Il ne se passe rien dans ces pages, ou pas grand-chose, mais j’ai aimé la mélodie du style.

    J’ai aimé découvrir plus intimement ces travailleurs de l’ombre dont on ne parle jamais, mais qui sont indispensables au bon fonctionnement de l’entreprise, contrairement aux premiers de cordée.

    Le problème des mains abîmées qui ne cicatrisent pas.

    Ces travailleurs qui ne lâchent jamais, ce qui peut représenter un problème.

    Enfin, j’ai aimé le message de l’auteure : c’est quand nous sommes trop en confiance que l’accident survient.

    L’image que je retiendrai :

    Celle de l’éternel problème des piles de jouets de fast-food.

    https://alexmotamots.fr/en-salle-claire-baglin/


  • Conseillé par
    31 octobre 2022

    Premier roman comme un constat factuel, sec et sans affect, Claire Baglin propose En salle, un récit court où elle met en perspective la vie d’ouvrier de son père et son statut d’employé précaire d’un fast-food bien connu.
    Brins d’histoire

    Le premier récit est celui d’un ouvrier, Jérôme, et de sa famille avec sa femme Sylvie, son fils Nico, sa fille, la narratrice, jamais nommée. Se présente au fil des souvenirs l’enfance, le camping des vacances, les voyages en voiture, les bagarres violentes avec son frère, etc. Depuis plus de vingt ans, Jérôme est opérateur de maintenance et fait les 3/8. Les enfants ne savent jamais quand il va rentrer. Du coup, c’est la fête à chaque fois.

    Avant de rentrer, pour reprendre la routine, sur la route du retour des vacances, les enfants supplient le père de s’arrêter dans ce restaurant si éclairé, si attirant, si pimpant. Pour toute une génération, ce fut le rêve devenu accessible même s’il faut compter avant de commander.

    Seulement de cette vie sans aspérité, qui tourne toute seule, sans rien en attendre, l’entassement, « c’est héréditaire », ne cesse de répéter Jérôme, affleure comme une bosse à l’arrière du bossu.

    C’est de là que le travail dit faire mal. Jérôme répare ses trouvailles mais jamais complétement, il faut tant compter ! Alors, il amasse avec le « ça peut toujours servir » comme le seul moment de possession, de liberté et de rêve d’un possible attendu mais jamais atteint.

    Avec la métaphore de celui qui ne lâche rien, Claire Baglin insiste sur cette constante ouvrière qui est de se taire, de faire comme on le demande, sans jamais rien dire, muet (muette) sur son malaise, sur ce qui nie la personne dans ce travail déshumanisé.

    Car, en décrivant le quotidien de l’équipière idéale, sans respect d’aucune règle du monde du travail, Claire Baglin suggère qu’on est revenu au temps où la précarité remplace la fierté de l’ouvrier pour l’objet produit.
    Ce n’est plus d’ouvriers dont on parle

    Dans le monde de Donald, Déliveroo, Uber, Amazon et tant d’autres, la force de travail est niée par la fiche évaluative remplie par le manager et maintenant, le plus souvent aussi, par le client.

    Pas de sourire lors de ma commande, évaluation négative ! Attente de cinq minutes ma demande, évaluation négative. Pas satisfait du résultat de ma réclamation, évaluation négative. Règne de l’arbitraire pour mieux aliéner, contraindre, user, pomper et après jeter.

    La suite ici
    https://vagabondageautourdesoi.com/2022/10/26/claire-baglin-en-salle/


  • Conseillé par (Libraire)
    26 octobre 2022

    « Claire Baglin a 24 ans (n’a que 24 ans ?) et déjà un style et une idée très forte de ce que sent la littérature.
    Ce roman est une immersion, un plein temps dans le monde étriqué, répétitif, stressant de la restauration rapide.
    A la merci de petits chefs, soumise aux cadences effrénées, une coriace jeune travailleuse raconte son quotidien de labeur, et dévoile en même temps le passé ouvrier de son père. »

    Guillaume, libraire Charlemagne Toulon


  • Conseillé par (Libraire)
    4 octobre 2022

    De l'enfance à l'âge du premier boulot, Claire Baglin démontre avec subtilité l'expérience du travail par le corps.
    Un premier roman remarquable où l'apparente simplicité de l'écriture capte tous les déterminismes en jeu dans nos sociétés.
    Une vraie découverte.

    Sébastien.


  • Conseillé par (Libraire)
    1 octobre 2022

    Le travail dans un fast-food

    Un récit en deux temps : l'enfance de la narratrice avec son père ouvrier, des souvenirs de moments simples, des vacances avec des arrêts au restaurant, et le travail aujourd'hui dans un fast-food avec ses règles, ses managers, la rigueur du service, le nettoyage. Il y a les différents postes qu'elle occupe en salle, au drive, à la machine à café.
    Beau parallèle entre la vie ouvrière du père et le travail de la fille, avec ses gestes répétitifs.
    Premier roman au style maîtrisé.


  • Conseillé par (Libraire)
    23 septembre 2022

    La condition des équipiers

    Ce premier roman est d'une très belle intelligence. Les récits alternés mettent en parallèle ce que fut la condition ouvrière, pas enviable mais motif de fierté, et la condition des équipiers de fastfood. Et cette condition n'en est pas une, ce n'est pas une classe, aussi défavorisée soit elle. C'est la condition de personnes qui se lèvent pour un boulot merdique, avec une hiérarchie de pieds nickelés. Une condition de survie où le sentiment d'appartenance ne peut pas être.

    Ronan


  • Conseillé par (Libraire)
    15 septembre 2022

    "Venez comme vous êtes" !

    De l'experience Mac Do du rêve d'enfant à la réalité adulte...
    Métaphore du monde moderne !


  • Conseillé par (Libraire)
    14 septembre 2022

    « On y va, mais c’est exceptionnel ! »

    Un de ces romans où les héros ne sont pas des héros, un de ces romans qui transcrivent de façon quasi surnaturelle les angoisses du quotidien, les faiblesses, les doutes, les craintes, et au-delà de tout ça, les envies, les rêves. Un premier roman touchant, sur les gens qui n’ont pas trop de sous, la difficulté de les avoir et l’envie, toujours, malgré tout, d’offrir un quand même un bout de sourire aux enfants à l’arrière de la voiture. « On y va, mais c’est exceptionnel ! »


  • Conseillé par (Libraire)
    9 septembre 2022

    Quand elle y allait petite, c’était la fête avec son frère. Aujourd’hui qu’elle vit l’envers du décors, la fête est finie. L’efficacité doit-elle toujours être au détriment de l’humanité ?


  • Conseillé par (Libraire)
    3 septembre 2022

    Un parallèle ouvrier/employer de fast food

    La narratrice du texte raconte en parallèle sa propre expérience de travail dans un fast-food et ses souvenirs de son père ouvrier.
    Les employés de restauration rapide seraient ils devenus les ouvriers du XXIème siècle? Toute l'empathie que l'on peut avoir pour ce personnel de l'ombre en lisant ce texte nous donne une envie de rébellion contre un système de lobotomie normalisée dans les grandes franchises.


  • Conseillé par (Libraire)
    2 septembre 2022

    Naviguant entre passé et présent, « En salle » est le récit acerbe et mordant des coulisses d'une chaîne de fastfood et le portrait vibrant d'une famille ouvrière et d'une génération.

    Le passionnant premier roman de la déshumanisation au travail, servi par la voix singulière d'une autrice à surveiller !


  • Conseillé par (Libraire)
    1 septembre 2022

    Asservissements modernes

    Ce roman social et familial révèle de façon percutante le fonctionnement interne du fastfood le plus connu au monde, lieu de rêves, attractif pour certains, détesté par d'autres, perçu et éprouvé comme une machine à broyer, parfaitement huilée, sans humanité, excessivement hiérarchisée. Loin d'engager un portrait à charge, la narratrice met en parallèle sa propre situation professionnelle précaire, toute jeune embauchée sur le marché du travail et celle de son père, ouvrier épuisé par des années de labeur et d'endurance physique sans avoir même atteint l'âge de la retraite. C'est un monde de tensions, de convoitises et de concurrence permanentes qu'elle met en exergue, un monde rigide où tout est contrôlé et rien n'est explicité simplement. En apparence la façade est proprette, le tutoiement est de rigueur, la rudesse est excessive, silencieuse. Ce texte a une force littéraire incroyable et dévoile un talent narratif exceptionnel.


  • Conseillé par (Libraire)
    30 août 2022

    Premier roman percutant

    Claire Baglin livre un premier roman taillé à la serpe. Elle mêle ses souvenirs d'enfance où elle et son frère réclamaient d'aller au fast-food. Mais, étudiante, elle y travaille pendant une saison d'été. Elle décrit avec minutie les relations de travail, la hiérarchie, les gestes répétitifs, la chaleur, l'odeur de friture qui imprègne les vêtements, la peau, la pression...

    Un roman rythmé, précis, une écriture travaillée. Une belle découverte !

    Vanessa


  • Conseillé par (Libraire)
    30 août 2022

    Roman fort et maîtrisé sur le monde du travail.

    La narratrice met en parallèle son expérience d'employée de fast-food et ses souvenirs de fille d'ouvrier à l'usine avec drôlerie, colère et tendresse.

    Son talent d'écriture et d'évocation est tel que ce roman dépasse la seule dénonciation des bullshits jobs et nous révèle une autrice qu'on a hâte de suivre.


  • Conseillé par (Libraire)
    29 août 2022

    Coup de cœur d'Evelyne

    Un premier roman en forme de coup de poing !
    La narratrice vient de débuter son premier job, chez McDo. Elle nous raconte l'apprentissage absurde des codes pour les commandes, de la hiérarchie des postes sans qu'on sache toujours pourquoi celui-ci est mieux que cet autre, l'abrutissement lié à la répétition des tâches, de l'omniprésence du bruit... Ce récit social intense et douloureux parfois est aussi parcouru par le récit des plaisirs de la narratrice enfant quand sa famille allait au McDo... Étrange face à face à dix ans d'intervalle... Et c'est dans ce face à face que Claire Baglin raconte le mieux la société du travail aujourd'hui et la violence sociale en France. Se lit d'une traite.
    A découvrir absolument !
    Librairie La Promesse de l'Aube


  • Conseillé par (Libraire)
    22 août 2022

    Au royaume de ronald !

    Un regard juste et original sur le monde du travail avec un construction croisée entre le passé et le présent. Elle détaille précisément ces mouvements répétitifs, ces mécanismes de travail qui nous poussent toujours à aller plus vite, à aller chercher la performance au détriment de l'humain. Un premier roman mené avec brio.


  • Conseillé par (Libraire)
    17 août 2022

    Collaborer

    Un premier roman impressionnant de maîtrise, social, intime, nostalgique, et surtout très prenant, d'un réalisme qui nous met dans les bottes d'une "équipière" de fast-food, dont les tâches sont décrites dans les moindres détails, avec justesse.

    Même si le thème se rapproche de ceux explorés par les naturalistes ou les représentants de la littérature sociale, le style, tout en finesse et en clair-obscur, parvient à porter le roman dans des eaux moins familières. Une belle réussite.


  • 3 août 2022

    Une primo-romancière à suivre !

    En salle est composé de 2 récits séparés par une dizaine d'années. D'un côté, l'enfance au sein d'une famille modeste qui raconte une vie de débrouille et de récup'. De l'autre, l'entrée dans le monde du travail avec un 1er emploi dans un fast food. Deux époques, deux expériences du monde du travail qui dialoguent à travers le temps.
    Ce qui frappe chez Claire Baglin c'est la rigueur et la précision dans ses descriptions du quotidien et de l'ordinaire. C'est son regard incisif, quasi clinique mais sans jugement. C'est aussi le rythme qu'elle insuffle à ses phrases et qui embarque le lecteur. C'est enfin son humour mordant, décapant. Une primo-romancière à suivre !