sandrine57

Lectrice compulsive d'une quarantaine d'années, mère au foyer.

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23 janvier 2013

Il y a fort fort longtemps, les estoniens vivaient au coeur de la forêt en totale harmonie avec la nature. Et puis, de la mer, sont venus les chevaliers allemands et avec eux, la modernité et le christianisme. Eblouis par ces hommes de fer, convaincus par les moines, les estoniens ont peu à peu quitté les bois pour vivre dans des villages, cultiver la terre et adorer Jésus-christ.
Mais Leemet n'est pas de cette eau là! Certes, il est né au village mais suite à un incident malheureux mettant en scène un ours, un adultère et une décapitation, sa mère est retournée dans la forêt avec ses deux enfants. Leemet a donc grandi dans le respect des traditions ancestrales et surtout, il a appris la langue des serpents. L'apprentissage fut douloureux, il n'est pas donné à tout le monde de communiquer avec les vipères royales et de se faire obéir de tous les animaux. Mais Leemet a tenu bon, s'est musclé la langue et, brillant élève, a fini par maîtriser entièrement ce langage, sans se douter qu'il serait un jour le dernier homme à le parler...En attendant cette ère funeste, Leemet vit heureux dans cette forêt qu'il connait par coeur.

Avec ses amis, Pärtel et Hiie, sans oublier Ints, le jeune vipèreau, ils parcourent les bois en tout sens, rendent visite au dernier couple d' anthropopithèques éleveurs de poux, se régalent de délicieux rôtis d'élans ou de chevreuils et parfois jettent un oeil au village, intrigués par ces hommes qui ont oublié la langue des serpents, courbent l'échine dans les champs et se nourrissent de pain et de soupe d'orge. Bien sûr, leurs filles ne manquent pas de charme mais s'installer au village ce serait abandonner la liberté d'aller à sa guise, renoncer au plaisir interdit d'observer les femmes se flagellant, nues, à la cime des arbres certaines nuits de pleine lune, oublier la légendaire salamandre qui dort, bien cachée, quelque part au fond des bois. Leemet n'est pas prêt à cela et même quand la forêt se dépeuple inexorablement, même quand son meilleur ami suit le mouvement, même quand sa soeur se met en ménage avec un ours faute d'homme à marier, même quand il se sent seul, même quand Ülgas, le sage étend sa néfaste influence aux derniers résistants, Leemet tient bon, convaincu que ceux qui sont attirés par les sirènes de la modernité ont perdu toute raison. Seul rescapé de l'exode, il vivra seul, dernier homme du peuple de la forêt, dernier gardien des traditions.

Que dire de cette fantastique épopée pour que le public français en fasse le succès littéraire qu'il connait déjà en Estonie? Peut-être que chacun y trouvera son compte...Les écolos découvriront une ode à la nature où l'on l'homme vit en symbiose avec le règne animal, ne prélevant que ce qui lui est nécessaire pour vivre. Les amateurs de fantastique pourront lire une histoire épique où un cul-de-jatte peut s'envoler dans les airs tel un oiseau, une salamandre peut repousser l'envahisseur si des milliers d'hommes lui en sifflent l'ordre. Les assoiffés de sang y trouveront le récit de batailles sanglantes, de morts atroces, de rites sacrificiels. Ceux qui aiment rire seront comblés par la tournure comique de certaines scènes, quand les femmes de la forêt s'offrent aux ours patauds, mignons et terriblement séducteurs, quand les villageois se pâment devant le crottin de cheval que les chevaliers sèment dans les champs tandis que les filles s'émerveillent du chant des moines auxquels on coupe "les choses" pour rendre leurs voix plus mélodieuses, quand tous vénèrent Jésus comme une idole. Les historiens en apprendront beaucoup sur la culture estonienne, ses mythes, ses légendes. Et tous aimeront Leemet, le dernier homme à pouvoir parler avec les serpents. Il a bien essayé de vivre au village mais n'a pas su s'y adapter. Même si le récit de la disparition inéluctable de son mode de vie prend parfois des accents tristes et tragiques, ce n'est pas pour autant une histoire larmoyante et nostalgique, c'est juste le constat que l'avancée de ce qu'on appelle le progrès est inéluctable mais que l'on peut choisir de s'y soustraire, en toute connaissance de cause, quitte à être le dernier.
Il y aurait encore tant à dire mais l'ultime conseil sera : Précipitez-vous sur ce livre hors du commun!!

1

Sakakibara, Mizuki / Nishida, Masafumi / Giner, Pierre / Sunrise

Kazé Manga

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22 janvier 2013

A Stern Bild City, l'émission qui cartonne, c'est "Hero TV live", une sorte de télé-réalité dont les protagonistes sont des super-héros. Filmés lors de leurs actions héroïques, ils gagnent des points en fonction de leurs exploits et chacun espère être élu "Roi des héros". Dans ce contexte de compétition acharnée, Wild Tiger passe pour ringard. Il ne sait pas se mettre en valeur à l'écran et défend des valeurs totalement dépassées. Pour mieux se démarquer des autres héros, l'agence qui vient de racheter son contrat décide de lui adjoindre un petit nouveau : Barnaby Brooks Jr. Un jeune homme moderne qui, lui, a tout compris des ressorts de la télé-réalité. Ensemble, ils vont devoir lutter contre le crime mais leurs visions de la vie et du métier de super-héros sont totalement opposées et leur collaboration s'avère difficile.

Avec Tiger & Bunny, le manga investit l'univers des super-héros et l'adapte aux contingences du monde moderne. Fini le héros qui sauve le monde en toute discrétion! Maintenant, il se laisse filmer, s'interrompt durant la coupure pub, affiche fièrement le nom de ses sponsors et montre même son vrai visage. Dans ce contexte, Wild Tiger fait figure de has-been boudé par le public. Pour lui, faire le bien est un sacerdoce, un acte gratuit et altruiste. A l'opposé, son nouveau binôme joue avec les caméras et fait tout pour être connu et reconnu. Bien loin des valeurs de sacrifice et d'abnégation prônées par son coéquipier, il veut être élu Roi des héros et est prêt à tout pour y parvenir.
Ce premier tome de présentation ouvre de belles perspectives. L'action est au rendez-vous, au détriment des dialogues d'ailleurs, et l'humour est omniprésent. Les dessins sont aboutis et non dépourvus d'intérêt. Une bonne entrée en matière qui donne envie d'en savoir plus sur la vie de Tiger et Barnaby, surnommé Bunny par son partenaire, et de connaitre l'évolution de leur collaboration.

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18 janvier 2013

Ce n'est pas la grande forme pour l'inspecteur Carl Mørck. Mona Ibsen, la psychologue élue de son coeur, est en mission humanitaire en Afrique et Vigga, sa future ex-épouse menace de réintégrer le domicile conjugal, ce qui tomberait plutôt mal puisque Carl vient d'installer Hardy, son coéquipier tétraplégique dans son salon. Dans les locaux du département V, Assad et Rose sont en effervescence. La police écossaise leur a fait parvenir un message découvert dans une bouteille à la mer. Pratiquement indéchiffrable, le texte est en danois et date de plusieurs années. Ses deux assistants se passionnent pour l'affaire mais Carl a des doutes, après tout il pourrait ne s'agir que de la plaisanterie d'un adolescent. Mais à mesure que les mots apparaissent, l'affaire devient sérieuse.

Deux frères appellent à l'aide, kidnappés et menacés de mort par leur tortionnaire. Les faits datent de 1996 et ont dû se régler d'eux-mêmes puisque la disparition des enfants n'a jamais été signalée. L'équipe de choc du département V est loin de se douter que pendant qu'ils s'interrogent en vain, le kidnappeur est toujours en activité et ses deux nouvelles proies déjà repérées.

La troisième enquête du département V nous entraîne dans les pas d'un tueur d'enfants machiavélique qui fait profession du kidnapping et en profite pour régler des comptes avec une enfance malheureuse, un homme malin et insaisissable qui trouve ses proies dans les sectes et autres religions rigoristes qui pullulent au Danemark. Démunies devant le malheur qui les accable et effrayées par les menaces de l'homme, les familles taisent l'horreur qu'elles vivent, se replient dans leur foi et leur communauté et le tueur continuent ses activités en toute impunité. Pour Mørck et son équipe, c'est une véritable gageure de retrouver cet homme qui ne laissent aucune trace derrière lui. D'autant qu'ils s'occupent aussi d'une enquête sur des incendies criminels que Mørck espère résoudre très vite, histoire de damner le pion à ses collègues du département A.
L'intrigue est un peu longue à se mettre en place mais la deuxième partie reprend de la vigueur et le final est comme toujours particulièrement haletant. Délivrance apporte le même plaisir de lecture que ses deux prédécesseurs avec une enquête prenante et les notes d'humour entre les équipiers de l'unité spéciale. Assad reste toujours aussi énigmatique, son chef s'interroge, tente d'en savoir plus mais le mystère s'épaissit. Rose claque la porte du bureau mais envoie sa jumelle Yrsa pour la remplacer, aussi blonde et rose que l'autre est sombre, elle a tout de même en commun avec sa soeur le fait de n'en faire qu'à se tête. Dans cette ambiance de folie douce, Mørck tente de faire respecter ses ordres, tout en commençant une psychothérapie avec un confrère de Mona. Pourra-t-il faire la lumière sur l'affaire qui le hante? Hardy semble penser qu'il en sait plus qu'il ne le dit mais il s'en défend. Ment-il ou, rongé par la culpabilité, a-t-il occulté inconsciemment des éléments de l'enquête? La suite au prochain épisode dont on espère qu'il sera très vite dans les librairies!

La deuxième enquête du département V

2

Albin Michel

23,90
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15 janvier 2013

Après trois semaines de congés bien mérités, Carl Mørck retrouve le sous-sol de la préfecture de police, son bureau, son assistant et ses piles de dossiers. L'épilogue heureux de l'affaire Lyyngaard a attiré l'attention sur le département V et il s'apprête sans enthousiasme à accueillir une délégation norvégienne. Quand il découvre sur son bureau un dossier mis en évidence, il s'en désintéresse très vite. Un double meurtre vieux de 20 ans dont l'assassin a avoué et purge actuellement sa peine, ce n'est pas une affaire pour son unité. Mais il découvre qu'une bande de jeunes privilégiés, élèves dans un pensionnat très select avait à l'époque était soupçonnés.

Des six membres de ce groupe, l'un est décédé, un autre -le seul "pauvre"- est celui qui est en prison, l'unique fille a disparu et semble vivre dans la rue comme une clocharde et les trois autres sont devenus encore plus riches, puissants et influents. Il n'en faut pas plus pour éveiller l'intérêt de Mørck, surtout quand il reçoit l'ordre formel d'abandonner l'affaire. Avec son habituel esprit de contradiction, il décide de reprendre l'enquête, toujours secondé par le fidèle Assad et avec, en prime, la collaboration d'un nouveau membre du département : Rose, une jeune punkette, secrétaire de son état et réfractaire à l'autorité elle aussi.

Après un premier opus si réussi, on avait hâte de savoir si Jussi ADLER-OLSEN serait capable de transformer l'essai et de x un second livre à la hauteur du premier. Et bien la réponse est oui! oui! oui! Trois fois oui!
Cette fois il s'intéresse à la grande bourgeoisie danoise et à ses membres moins respectables qu'ils n'en ont l'air. Une bande d'adolescents privilégiés, adorateurs d'Orange mécanique, trouvent dans la violence un exutoire à leur enfance dorée mais dépourvue d'amour. Adultes, ils sont restés les mêmes. L'argent, l'influence, le pouvoir ont même décuplé leurs instincts meurtriers et le doux vertige de l'impunité les enivrent. La seule faille vient de Kimmie, la fille de la bande. Elle les a quittés, les a fuis mais elle est une menace de chaque instant. Elle sait, elle peut parler, elle peut se venger.
JUSSI-ADLER a particulièrement soigné la psychologie de ses personnages torturés et effrayants. Mais il n'en oublie pas pour autant son tandem d'enquêteurs et nous régalent de leurs dialogues et de leur complicité. S'y ajoute une nouvelle recrue tout aussi atypique, une secrétaire dont aucun service ne souhaite s'embarrasser et qui donne du fil à retordre à l'irascible Mørck.
Même si l'on connait les coupables dès le début, l'enquête tient en haleine jusqu'à l'épilogue où l'on craint pour la vie de l'opiniâtre tandem. S'il fallait trouver un défaut à cette seconde aventure du département V, cela viendrait plutôt des questions qui n'ont toujours pas de réponses. On sait par exemple que Mørck soupçonne son assistant de mentir à propos de ses origines syriennes mais le sujet n'est plus abordé. On soupçonne aussi que l'affaire qui a coûté la vie à un de ses coéquipié et paralysé l'autre pourrait être une embuscade plutôt qu'un malencontreux hasard et qu'un des policiers serait impliqué mais il faudra encore être patient pour en savoir plus. Peut-être dans Délivrance, le troisième tome dans lequel je vais me plonger de ce pas. Affaire à suivre....

23,90
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14 janvier 2013

A Chester's Mill, les jours passent et le dôme est toujours là, inamovible. Mais le danger semble plutôt venir de l'intérieur et de Big Jim Rennie prêt à tout pour s'emparer de la ville. Il ne cesse de renforcer les effectifs de la police en engageant des jeunes violents, stupides, donc dangereux. Ayant pris soin de mettre Dale Barbara, son principal adversaire, sous les verrous accusé d'un quadruple meurtre, il peut désormais conduire les affaires à sa guise. Tant bien que mal, la résistance s'organise, composée essentiellement de femmes et d'adolescents. En infériorité numérique, ils disposent tout de même d'un atout essentiel : ils connaissent la source du dôme!


Violence, cruauté, folie, avidité contre courage, abnégation et naïveté, c'était la recette du premier volume et cela ne change pas dans le second. L'action souffre des longueurs du récit et le manichéisme finit par lasser. On aurait aimé que chez les méchants, certains prennent conscience de la folie de leur leader et se retournent contre lui. On aurait apprécié que les gentils soient un peu moins benêts et apprennent que parfois il faut utiliser les armes de son ennemi pour en venir à bout. Parce que les bons sentiments, ça va bien un moment mais quand même! Et pourtant, KING s'en sert à tout-va et nous concocte même une fin digne du pays de Candy. L'explication à la présence du dôme était déjà limite mais la solution pour le faire disparaître frise le ridicule et l'histoire d'amour naissant entre deux des résistants est la goutte d'eau qui fait déborder le vase de la mièvrerie et de la leçon moralisatrice.
Petite déception donc mais vues les dernières productions "kinguiennes", celui-ci tire son épingle du jeu et renoue avec ce qui faisait le talent du maître. Encore un petit effort et il reviendra à son meilleur niveau!